Le Doré et les Mouches par Louis Tanguay

     Nous sommes portés à associer, trop souvent peut-être, la pêche à la mouche aux salmonidés seulement. Bien des amateurs, nouvellement initiés à ce mode de pêche, sont étonnés d'apprendre que le doré est un poisson répondant bien à une artificielle. D'autre part, la littérature sur la pêche à la mouche, ne donne habituellement que très peu de renseignements sur le sujet.

Le Doré et les Mouches
     Évidemment, il existe plusieurs façons de pêcher le doré. Cependant, ceux qui l'ont déjà péché à la mouche, conviendront que le combat qu'il livre dépasse parfois de beaucoup tant par sa résistance et ses courses, celui que peut offrir une truite de même taille.

     Le pêcheur à la mouche, dont l'approche est principalement guidée par le résultat de ses observations, a certainement avantage à exploiter les informations disponibles sur les caractéristiques biologiques et le comportement de ce poisson.

     À l'instar du brochet, le doré est fortement cannibale. Il se lance avec fougue sur toute proie qui croise son champ de vision; toutefois, et c'est ici qu'il diffère du brochet, la couche spéciale de son oeil, extrêmement sensible à la lumière du jour, l'oblige à chercher refuge en des endroits sombres.

     S'il ne réussit pas à s'accommoder sous des lits d'herbes aquatiques ou des troncs d'arbres submergés, il ne tardera pas à descendre en eau plus profonde pour s'isoler d'une lumière trop incommodante.

     Certaines observations cependant laissent croire qu'il ne demeure pas en eau profonde de façon permanente. Le doré semble bien tolérer les variations de température de l'eau; s'il ne peut s'assurer sa pitance coutumière en eau profonde, c'est à la tombée du jour qu'il remonte vers la surface pour se mettre en quête de nourriture. Il ne se gêne pas, non plus, pour se manifester à la surface de l'eau. Certains soirs, où tout est calme, et pour peu que nous soyons attentifs, il n'est pas rare de voir poindre une nageoire dorsale. Inutile de préciser les sentiments qui animent un pêcheur à la mouche dans de telles circonstances; surtout quand on sait que le doré est naturellement porté à vivre et à se déplacer en bancs!

     Ces informations m'ont toujours assez bien servi; de façon générale, quand je pêche dans un plan d'eau que je ne connais pas, je cherche d'abord les endroits où la végétation aquatique est assez dense ou encore, les parties du lac que le soleil n'atteint pas ou très peu. Si tel est le cas, je ratisse minutieusement ces lieux. Si mes efforts devaient s'avérer infructueux, je continue mon exploration en eau plus profonde.

     Dans les rivières où le courant est assez fort, la situation peut varier sensiblement. Au pied des rapides, là où l'eau est particulièrement agitée et généralement plus trouble, le doré peut y trouver une protection suffisante et par conséquent être plus actif en surface durant le jour. Je dois avouer cependant que même en rivière j'ai réussi mes plus belles prises à la tombée du jour.

L'ÉQUIPEMENT

     Pêcher le doré à la mouche ne nécessite pas, à mon avis, l'utilisation d'un attirail bien particulier. Une canne de 8½ pieds pouvant supporter une soie #7 ou 8 est nettement suffisante. Il n'y a pas non plus de règles absolues sur le choix d'une soie pour ce type de pêche. Avec de gros streamers et de gros bucktails dans des eaux dont la profondeur peut varier sensiblement, je préfère une soie dont le poids est concentré vers l'avant et dont le bout seulement est calant. Ces soies sont identifiées sur l'emballage par les lettres «WFST» c'est-à-dire «Weight Forward Sinking Tip». Pour éviter de neutraliser l'effet de la soie il est préférable d'utiliser des avançons courts.

Les artificielles

     Le doré ne semble pas très sélectif dans le choix de sa proie. Je suis d'avis qu'un streamer ou un bucktail péché convenablement peut être très efficace. Pour des raisons que j'ignore, cependant, le doré semble se laisser séduire plus facilement par des artificielles de couleur jaune, orange et rouge.

     Voici quelques suggestions d'artificielles que j'utilise régulièrement.

Streamer Marabou sculpin Matuka

     Ce streamer, dont l'aile faite de plumes de marabou jaune et rouge et retenue au corps par une lamelle métallique (style matuka) est très résistant et ne tarde pas à réagir sous l'eau au moindre mouvement de la canne.

Bucktail Blonde Orange

     Au dépat, la série «Blonde» avait été conçue par Joe Brook pour la pêche en eau salée. Aujourd'hui, après plusieurs essais, elle est également très efficace pour le doré. L'extrémité est faite de poils de queue de chevreuil teint orange, le corps d'une lamelle métallique argent et l'aile, de poils de queue de chevreuil orange attachée de façon à ce qu'elle forme un angle de 45 degrés avec la tige de l'hameçon.

     J'aimerais que cette artificielle puisse vous entretenir des nombreuses attaques de dorés dont elle a été victime: de ce soir d'été, où après avoir déjoué une vingtaine de dorés de 2 et 3 livres, et de les avoir relâchés délicatement, elle se voyait engloutir dans une immense gueule bordée de dents pointues, une «vraie gueule à sens unique», quoi! Mon compagnon de pêche qui, au bout de sa canne, tentait de récupérer et son souffle, et sa Blonde Orange, et son poisson ne se doutait guère qu'il allait remporter les honneurs du tournoi de Pêche Molson avec un doré de 11 livres et 7 onces!

Type «Keel»; Mickey Finn sur hameçon keel

     Comme je le soulignais précédemment, il est parfois très avantageux de pêcheur dans les endroits où la végétation aquatique est assez dense. 

     Dans de pareilles situations, les hameçons de type «Keel» peuvent être très utiles. Sur ces hameçons, l'aile du streamer ou du bucktail couvre la pointe et permet ainsi de pêcher plus facilement sans que l'artificielle ne soit constamment accrochée à la tige des plantes aquatiques.

Truc; Blonde, pointe protégée par une section de monobrin

     Si vous ne possédez pas de tels hameçons, vous pouvez recourir à un petit truc, largement publicisé par Dave Withlock, et qui consiste, avant même d'attacher l'artificielle, à fixer un bout d'une section d'un monobrin sur le dessus de la hampe puis, une fois l'artificielle complétée, à enfiler l'autre bout du monobrin dans l'oeil de l'hameçon que vous ancrez solidement en complétant la tête de l'artificielle. Pour que le monobrin protège efficacement la pointe de l'hameçon, prenez soin de lui faire épouser la courbure de l'hameçon. Cette protection est efficace et élimine une foule de désagréments.

     Bien que la majorité des artificielles mentionnées précédemment soient difficiles à trouver sur le marché québécois, il ne faut pas conclure cependant qu'elles sont seules efficaces pour pêcher le doré.

     Les Mickey Finn, Marabou Muddler, Needahbeh, Yellow Perch et Colonel Bâtes dans les dimensions #2, 4, 6 peuvent vous assurer de bons résultats et II s'en trouve facilement dans les magasins d'articles de pêche.

Références

» Texte: Louis Tanguay (Mai 1980).
» Photos: Bill Dousett.
» Magazine Sentier Chasse & Pêche.

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