La Pêche à la Sèche

Les règles particulières

     S'il existe des stratégies de pêche générales pour la pêche dans les fosses classiques ou régulières, la pêche à la sèche peut être avantageusement utilisée dans un secteur de pêche à l'eau vive où dans des conditions particulières de présentation.

Dans les rapides

La pêche à la sèche
La bordure non turbulente

     La bordure du courant est l'endroit idéal pour présenter les mouches dans un rapide où se tient le saumon. Tout le long du rapide, à la bordure des creux et des crêtes, il y a une zone où l'eau s'écoule pratiquement à la même vitesse que dans la zone de turbulence du courant rapide, c'est dans cette zone qu'il faut déposer vos mouches. Mais attention à l'attaque car rappelez-vous que le saumon prend la mouche à une vitesse proportionnelle à celle du courant. Plus le courant sera rapide et plus l'attaque sera rapide.

Le miroir dans le rapide

     À l'intérieur du rapide, recherchez les zones de miroir. Dans de nombreux rapides, le profil du fond de la rivière favorisera la formation de "miroirs" en surface. Ces miroirs sont comme des fenêtres pour le saumon. Y déposer une mouche sèche peut vous causer de grandes émotions. Attention !

Dans la turbulence

     Dans les zones de turbulence, utilisez une mouche qui flotte facilement et de taille supérieure à celles normalement utilisées dans les zones de repos.

     Si la mouche coule sous l'effet de la turbulence de l'eau, il faut la retirer sans éclaboussure et rechercher une zone de passage qui la laissera flotter.

     Dans les rapides, la stratégie de pêche d'aval en amont et par couloir (ré.: Salmo Salar no. 37) doit être utilisée de manière à ce que le saumon ne puisse distinguer la soie avant la mouche. Soyez très vigilant car l'attaque est très rapide.

La pêche à la sèche
Pêcher par l'amont

     Pour pêcher une fosse inaccessible par la berge ou par l'arrière, il faut procéder par l'amont et se placer en face des saumons mais assez loin pour ne pas être vu.

     Le lancer doit être celui du serpentin. On obtient cette présentation en s'assurant que la longueur de soie déployée sera suffisante pour permettre à la mouche de se rendre au saumon. Pour obtenir ce genre de lancer, il faut déployer cette longueur de soie devant nous et secouer la canne de gauche à droite d'un mouvement ferme et ample, avant qu'elle ne touche l'eau. Ainsi, la soie se déposera sur l'eau en serpentin. En descendant le courant, la soie se redressera, laissant voguer la mouche naturellement jusqu'au saumon.

     Soyez très attentif, car vous devrez ferrer « uniquement » lorsque la soie sera tendue par le saumon preneur.

Quand et comment ferrer...

     Contrôler ses émotions est sûrement l'élément le plus important de la pêche à la sèche. Si le saumon perce l'eau et ne prend pas la mouche, il ne faut pas ferrer car le retrait violent de la mouche pourrait indiquer à ce dernier le subterfuge qui le guette.

     Il vous faut absolument surveiller « uniquement » la mouche et ferrer au moment où cette dernière disparaît et que votre soie se tend. Lorsque la mouche n'est plus apparente c'est que généralement elle est dans la gueule du saumon et il faut ferrer avec vigueur.

     Le ferrage se fait en soulevant énergiquement la canne au bout du bras et, simultanément, avec l'autre main, vous tirez vigoureusement la soie vers vous, dans un mouvement de retrait.

     Ce dernier geste permet de récupérer vivement la soie qui n'est pas tendue comme à la pêche à la mouche noyée. Le grand facteur des ferrages ratés à la sèche, est généralement une soie libre non récupérée.

     Cette façon de ferrer à la sèche est la meilleure pour piquer solidement le saumon preneur dans presque toutes les conditions de pêche.

Combattre avec un petit avançon

     Premièrement, prenez un avançon de six livres, attachez-le à votre soie et nouez cet avançon à la clôture ou à un arbre. Deuxièmement, tenez votre canne à la verticale et essayez de rompre l'avançon. Vous craindrez probablement que cet exercice ne casse votre canne plutôt que l'avançon. Sachez que, lorsque nous combattons avec un saumon, la tension que nous exerçons sur ce dernier est très inférieure à six livres.

     Les petits avançons vont rupturer plus facilement parce qu'ils sont plus fragiles à l'usure des coups et des frictions occasionnés par les lancers.

     Il faut vérifier et changer plus souvent les bouts d'avançon de faible résistance. Si votre avançon est en bon état, seule une sévère friction sur un cran rocheux ou une descente violente du saumon dans un rapide où on ne peut le suivre et où il faudrait bloquer sa course, pourra venir à bout d'un avançon de six livres. En résumé, vérifiez régulièrement votre avançon de six livres. Il ne vous restera qu'à combattre de façon régulière votre roi poisson.

Eau froide Vs eau chaude

     À la sèche, la différence la plus importante dans le comportement du saumon dans l'eau froide est sa vitesse de déplacement lors de l'attaque. Ce dernier est beaucoup plus lent à répondre au stimulus de la sèche.

     Pour obtenir un certain succès, il faut choisir votre cible avec discernement. Recherchez les saumons localisés sur les pieds de fosses, dans une mince épaisseur d'eau. Soyez prudent, ne faites rien qui pourrait déranger le saumon ou lui indiquer votre présence. Péchez-le en vous plaçant derrière lui pour plus de succès.

     À l'eau chaude, en juillet et août, le saumon est beaucoup plus réceptif à la sèche. Recherchez les candidats qui sont localisés dans l'eau mince et vive, ce sont les meilleurs sujets pour gober votre sèche.

Théorie du *stimulus

     À la lumière des différentes observations que nous avons faites sur les rivières du Québec, une théorie qui en vaut bien d'autres nous semble intéressante.

     Le saumon est un poisson agressif et territorial. Tout au long de sa migration il répond à des stimulus ou irritants plus ou moins importants.

     Lorsque salmo salar attaque une mouche artificielle, c'est que le stimulus s'est maintenu assez fort et longtemps pour que ce dernier réagisse. Lorsqu'il ne fait que « lever » sur la mouche présentée c'est que le stimulus s'estompe pendant son action.

     Deux raisons probables à cet état de fait: premièrement, la mouche n'a pas provoquer le saumon de la bonne façon (dépôt sur l'eau, position par rapporta lui), deuxièmement, le stimulus a duré trop longtemps avant le moment de l'attaque. Il a donc diminué entre le moment où le saumon décide de lever et celui où il devrait prendre la mouche. Cette diminution de l'irritant a entraîné une diminution de sa motivation à l'attaque.

     Il faut donc essayer de créer l'environnement le plus propice à conserver l'agressivité de salmo salar pour l'attaque. Il ne faut pas oublier que « monsieur » le roi défend son territoire.

Septembre à la sèche

     S'il y a une période où les adeptes de la pêche au saumon doivent être patients, c'est bien en septembre, mois privilégié pour ses décors multicolores et ses matins froids et brumeux. A cette période, il reste encore de superbes excursions de pêche au saumon à faire sur les rivières qui le permettent. Tous les saumoniers du Québec ont vécu une journée de pêche automnale sur la rivière Matane. Un levé de soleil à la « Lebreux » ou un banc de brume au « Panier » font partie des beaux souvenirs d'une excursion.

     À cette période le saumon est influencé par la fraie qui arrive et réussir à attirer son attention sur une sèche est un défi de taille. Toutes les mouches sèches sont aussi productrices pendant cette période que pendant la saison estivale. L'approche doit être très délicate et la principale qualité recherchée est l'effet de surprise. Aussi vos premiers lancers doivent-ils être parfaits. L'avançon doit être de petite taille et au moins une fois et demie la longueur de votre canne.

     Avant de quitter la fosse, après avoir péché de façon traditionnelle sans succès, prenez le temps de passer une dernière sèche sur les saumons localisés en lui donnant un mouvement de drague sur la surface de l'eau. Vous pourriez être surpris des résultats...

     Bonne pêche!!!

*Stimulus : Élément de l'environnement susceptible d'activer certains récepteurs sensoriels d'un Individu et d'avoir un effet sur son comportement.

référence

» Par Bernard Beaudin, Pierre-Paul Turcotte
» Photos Roland Greendale, Bernard Beaudin, Pierre-Paul Turcotte
» Salmo Salar #38, Printemps, Février 1995.
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