Le Saumon de l’Atlantique au Quebec en 1977

Jean-Paul Dubé

Le Saumon de l’Atlantique au Quebec en 1977

Partie I
LA SURVIE DU SAUMON EST'ELLE ASSUREE ?
A- Les Captures "Incidentelles"
B- Les Pêcheries Autochtones
C- La furonculose
D- Le Braconnage

Partie II
QUE VALENT REELEMENT NOS RIVIERES ? COMPARAISONS

Partie III
UNE PECHE DE QUALITE 

Partie IV
PEUT-ON EVITER LA SUREXPLOITATION TOUT EN DONNANT UNE CHANCE A CHACUN ?

PARTIE I; LA SURVIE DU SAUMON EST-ELLE ASSUREE ?

    Bien des gens dans presque tous les pays du monde regardent avec une admiration mêlée d'envie ce jeune géant nord-américain qui a nom: Canada. Il leur semble que la Providence a fait un petit effort spécial en dotant ce pays d'à peu près tous les avantages imaginables et en quantités illimitées tout comme, sans se l'avouer ouvertement, elle aurait voulu le faire sien quand le temps serait venu de prendre sa retraite.

     Un des joyaux de ce vaste empire est bien le Québec. On n'y trouve pas le climat de la Californie, mais les sites pittoresques abondent, les ressources naturelles semblent presqu'inépuisables et nous avons le tiers de l'eau potable sur cette planète. Une bonne partie de ces eaux recouvre le lit de plus de cent rivières à saumon.

     Aucun autre endroit n'a été doté d'autant de rivières et c'est du saumon que nous parlerons maintenant. L'Angleterre, l'Ecosse, l'Irlande, la Norvège, l'Islande et, en plus petites quantités, la France et l'Espagne ont su conserver une partie de leurs populations de saumons mais, malheureusement, tous les autres pays les ont vu graduellement disparaître.

     Ici, au Québec, que sera leur sort? Nous devrions maintenant être optimistes quant à leur survie, mais elle n'est pas si bien assurée. Grâce à de vaillants efforts du. Canada et de pays alliés, le problème que causait le Danemark a été à peu près réglé. Je suis réticent ici parce que même si le saumon peut maintenant atteindre les eaux canadiennes en plus grand nombre, une petite partie seulement peut se rendre dans le Golfe et la Baie des Chaleurs: les Terre-neuviens ont été longtemps victimes mais ils sont devenus pirates à leur tour et une très forte proportion des 4-5 millions de livres qu'ils capturent sont en migration vers nos rivières du Québec.

     C'est donc - une réussite fort mitigée que cette entente internationale. Vous allez me dire qu'il s'agit d'un problème interne, purement canadien, cette fois, et que ce devrait être réglé facilement. N'en croyez pas un mot! Nous en avons de semblables, purement québécois, ceux-ci et il n'y a pas encore de solution en vue.

     En 1972, le Canada, face à une situation qui devenait désespérée et aussi dans le but de forcer la main aux Danois, a décidé de réduire son propre effort de pêche commerciale et sportive du saumon. Les filets dérivants ont été bannis à jamais de Port-aux-Basques et de la Miramichi et la pêche côtière au filet a été interrompue pour une période de cinq ans, (maintenant six ans) sur tout le territoire affectant les systèmes de rivière St-Jean, Miramichi et Restigouche. Devant la générosité du gouvernement central qui acceptait d'indemniser nos pêcheurs devenant sans emploi, suite à cette mesure, le Québec emboita le pas et les filets furent aussi enlevés sur tout le littoral de la Gaspésie. En tous ces endroits, le pêcheur sportif voyait sa limite de prises réduite à deux saumons ou castillons par jour.

     Voila! Tous les intéressés se sont écriés, « des mesures sérieuses et adéquates sont enfin adoptées et le saumon va nous revenir comme au bon vieux temps! »

     Mais non, pas si vite! Québec n'a pas que l'Oratoire St-Joseph, le Rocher Percé et Guy Lafleur. Il a aussi une mentalité et elle n'est pas toujours facile à " digérer " parce qu'elle est souvent quasi-incompréhensible.

A - Les Captures " Incidentelles "

     Il y a quelques années, le Ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche se voyait confier le contrôle des pêches tant commerciale que sportive du saumon. Pour sa part, le Ministère de l'Industrie et du Commerce avait charge de toutes les autres pêches dans les eaux à marée du Québec; il émet les permis de pêche et voit à, l'observation des règlements. Il est un peu superflu de mentionner que cette amputation sur leur juridiction n'a pas été très populaire chez-eux et, comme on leur demande en plus de veiller à la conservation du saumon dans les eaux à marée, on peut facilement imaginer tout le zèle qu'on y applique.

     La vente du saumon pris à   la perche est prohibée et comme nous n'avons plus de pêcheurs commerciaux de cette espèce, il devrait être extrêmement difficile de se procurer ce délicieux produit. Mais non! Il y en a plus que jamais sur le marché. Nous vivons dans le pays du bon Frère André mais il ne faudrait tout de même pas le blâmer pour cet apparent miracle. C'est que les pêcheurs commerciaux ont le droit de vendre les prises dites "incidentelles".

     En 1972, lors de la mise en force du ban partiel de la pêche commerciale du saumon, il y avait au Québec 1,935 permis dits "à poissons de fond". En 1975» il y en avait 3,543 et, sans doute à cause du manque d'expérience ou de la peur d'aller au large chez ces nouveaux détenteurs de permis, ils sont tous à la recherche des poissons de fond tout près des côtes où, incidemment, le saumon est seul à voyager.

     En 1972 les 1,935 permis prenaient 22,600,000 livres de morue. 
     En 1975 les 3,543 permis en prenaient 13,400,000 livres!

     On serait porté à croire que si tant de monde qui, en passant, sont aussi pêcheurs commerciaux que vous et moi, se lancent dans ce métier, il doit y en avoir, comme on dit par ici, un "tirihle lot" de ces saumons pris accidentellement. En fait, on dit que ces nouveaux venus en prennent autant et probablement plus qu'il ne s'en prenait avant le ban.

     Vous allez demander, et avec raison, comment il se fait alors qu'il y ait plus de saumons dans les rivières des provinces de l'Atlantique qu'il en avait dans les années prédédant 1972, même si nos pêcheurs en prennent plus qu'avant, dans les eaux à marée. Et bien, c'est probablement que l'ampleur des prises le long des côtes du Grôenland ne nous était pas connue ou que le saumon commençait un cycle d'abondance comme cela se produit chez les poissons aussi bien que chez les animaux.

B - Les Pêcheries Autochtones

     Mais, les Terre-neuviens et nos pseudo-pêcheurs commerciaux ne sont pas nos seuls problèmes. Voici, qu'après avoir, à coup de millions payés par Ottawa, enlevé à des honnêtes gens un métier qu'ils pratiquaient depuis des générations, Québec décide que les pauvres Indiens manquent de calories et que ceux de Restigouche, par exemple, devraient manger 10,000 livres de saumon par année! On les convoque donc à un "pow-wow" organisé en bonne et due forme et on leur permet de tendre autant de filets qu'ils le désirent à l'entrée de la Restigouche, soit l'endroit le plus vulnérable que l'on puisse trouver en eau québécoise.


au dépotoir de la réserve restigouche
     Il se produit alors un exode de jeunes Indiens travaillant dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre qui, subitement, sont saisis de nostalgie pour leur pays natal. Quarante filets sont tendus, six nuits par semaine, pendant deux mois et, à la fin de la saison, on déclare bien candidement qu'on a un peu dépassé le quota permis: on en a pris 13,000 livres !

     Le fait est, que pour tous ceux qui connaissent bien l'ardeur au travail que démontrent toujours ces Indiens, il est extrêmement difficile à concevoir qu'ils passeraient la nuit à pêcher à moins de prendre au moins cinq saumons chaque fois qu'ils tendent leur filet.   Si je ne m'abuse, cinq fois quarante, ça fait deux cents. Alors, si on a pêche pendant cinquante nuits, ça fait bien 10,000 saumons et non pas 10,000 livres de saumon!

     Je rencontre une multitude de pêcheurs sportifs de la Nouvelle-Angleterre et on me dit que le saumon de la Restigouche est aussi facile à trouver dans leurs marchés qu'à la Coopérative des Pêcheurs de Carie-ton!

     A cet endroit précis où les Indiens ont obtenu, pour la première fois dans l'histoire, le droit de pêche au filet, un seul pêcheur, un dénommé Jellett avait un droit de tenture, et, il y a quarante-cinq ans de cela, on trouvait cela tellement dommageable pour la rivière que le Ristigouche Salmon Club lui paya la somme de $50,000.00 pour racheter son droit et éliminer son filet. Pourtant, à cette époque, il y avait beaucoup plus de saumons que maintenant et une telle somme achetait beaucoup plus que de nos jours !

     Avoir permis cette pêche crée un précédent extrêmement dangereux qui va inciter les Indiens à demander davantage, il est discriminatoire envers les pêcheurs commerciaux de bonne foi lesquels ont dû changer leur mode de vie dans l'espoir de conserver le saumon, il est injuste vis-à-vis tous les pêcheurs sportifs du Québec ou d'ailleurs, lesquels paient pour le privilège et s'attendent à capturer un saumon occasionnellement. Enfin, il donne aux braconniers le meilleur argument qu'ils aient jamais eu: "Si ces "crisses" d'Indiens peuvent prendre le saumon à la tonne et le revendre, pourquoi pas moé itou? "

     La preuve de ce dernier avancé n'a pas tardé à s'établir puisqu'à date, cette année, une centaine de filets ont été saisis dans les premiers milles de la Restigouche et de nouveaux apparaissent chaque nuit. Certains de ces filets ont jusqu'à mille pieds de longueur et bloquent effectivement toute la rivière.

     De plus, cette pêche par les Indiens est illégale parce qu'elle se pratique en plein estuaire de rivière, dans un secteur où les lois fédérale et provinciale interdisent toute pêche au filet.

     Comme aucune explication logique peut, être offerte a tous les gens - et, il s'agit bien de TOUS les gens - qui critiquent cette inconcevable maladresse, les auteurs appellent cela " une pêche de subsistance". Subsistence, mon derrière! Quand un de ces sales individus, comme il a été rapporté récemment, jette au dépotoir de Restigouche, vingt-neuf gros saumons parce qu'il n'a pas pu en obtenir $2.50 la livre, est-ce qu'il s'agit de la subsistance des rats du dépotoir? Je parierais qu'il n'y a pas un dixième des saumons capturés devant la Réserve qui y est consommé. Pour se prouver cela, il s'agit d'aller frapper à la porte de la plupart de ces pêcheurs, comme quelques uns de mes amis l'ont fait. Ce n'est pas du tout compliqué:
     " Avez-vous du saumon ? " 
     " Sure, corne on in "

     Il va vous amener dans sa maison et vous verrez dans sa baignoire de douze à vingt saumons: sa prise du matin. 
     " Take your pick "

     Dans la troisième semaine de juin, les Indiens avaient atteint leur quota alloué de 10,000 livres et ils l'admettent volontiers. Cependant quand on leur a demandé de cesser la pêche, le chef de la bande a répondu au délégué de Québec: " Arrêtez-les si vous voulez, moi, je ne les arrêterai pas." Nous sommes maintenant au neuf juillet et la pêche se continue sans aucune interférence de la part de nos agents qui attendent encore les ordres d'agir.
     Et, pourtant, si un blanc est pris à pêcher avec un lancer-léger ou a oublié son permis de pêche à la maison, on lui créera toutes sortes d'ennuis!

     Est-ce qu'une telle situation devrait être tolérée bien longtemps? Je n'ai pas encore été informé que la Réserve de Restigouche s'était séparée du Québec, pas plus que, le Québec s'était séparé du Canada. Avons-nous quelque chose à gagner en les laissant démunir une ressource importante, tout en défiant ouvertement nos lois?

     Je comprend le peu d'enthousiasme et même la réticence de nos agents à passer à l'action, parce que ces gens sont dangereux, mais, il serait si facile de cueillir un à un ces filets à l'aide d'une barge de débarquement empruntée de l'armée et, leur montrer qu'eux aussi sont assujettis à nos lois même s'ils obtiennent beaucoup plus d'avantages que les autres citoyens du pays.

     Je n'ai jamais eu de préjudice rarciaux et j'avais même de la sympathie pour ces gens qu'on appelait " des enfants de la nature".   Petit, on m'avait enseigné que les Indiens se nourrissaient beaucoup du poisson de nos eaux et du gibier de nos forêts, mais qu'ils ne tuaient jamais inutilement et qu'ils utilisaient tout de ce qu'ils abattaient. Voyez-ça maintenant. Je n'ai plus envie de les appeler des "enfants de la nature " mais bien plutôt, des enfants... de toute autre chose!

     Si l'on se croit obligé de leur donner la permission de pêcher - pour des raisons humanitaires, et non pas parce qu'ils y ont droit - qu'on accorde un permis à la bande, pour UN SEDL filet. A cet endroit, ce serait suffisant pour subvenir aux besoins de dix réserves comme celle de Restigouche.   S'il s'agit vraiement d'une "pêche de subsistance", les Indiens devraient être satisfaits et ce serait facile   alors de contrôler les prises et de mettre fin à la pêche dès que le quota aurait été atteint.

     S'ils n'acceptent pas une telle entente, c'est qu'ils sont définitivement de mauvaise foi, qu'ils n'ont qu'un seul intérêt: gagner de l'argent avec le saumon. Si cette source de revenus a été enlevée à nos pêcheurs commerciaux dans l'intérêt de la ressource, je ne vois pas pourquoi on permettrait aux Indiens de tirer profit de cette situation.

C - La Furonculose

     Un nouveau danger menace aussi le saumon et c'est la furonculose, répandue dans tout le bassin de la Restigouche, dont la Matapédia est un tributaire. Pendant les années 1975 et 1976, au cours desquelles, un grand nombre de saumons adultes étaient trouvés morts dans la rivière, on attribuait cette épidémie à l'eau basse et chaude (15° C +) qui favorise le développement de cette bactérie (aeromonas salmonicida). Cette année, elle a déjà commencé ses ravages, même si l'eau s'est maintenue à un niveau relativement très élevé et à une très basse température.

la furonculose
     Il n'y a peut-être pas lieu de s'alarmer induement, mais un très fort pourcentage de nos saumons en sont atteints. Il y en a beaucoup dans la rivière et la première vague de castillons (grilses) résultant du frai de 1972 fait maintenant son apparition. 1972 était la première année du ban partiel de la pêche commerciale du saumon et un grand nombre a frayé parce qu'on avait pas encore perfectionné les méthodes de captures incidentelles".

     Si les conditions normales d'étiage se présentent, il y aura donc une très forte concentration de saumons dans certaines fosses et cette épidémie pourrait alors atteindre des proportions vraiment alarmantes.

     La bactérie se répand dans l'eau par des plaies ouvertes et virulentes qui caractérisent la maladie quand elle a atteint un degré avancé. Les autres saumons sont contaminés facilement et rapidement lorsqu'ils portent une blessure quelconque.

     Quand on connait la proportion importante de saumons qui ont des plaies résultant de filets dont il se sont échappés, on voit encore un autre effet du braconnage, lequel peut contribuer énormément à propager cette maladie à une vitesse effarante.

     Il y a très peu que le pêcheur puisse faire à part éviter de contribuer à répandre le mal.   Si un saumon est trouvé mort, il devrait être enterré immédiatement ou remis aux autorités de la rivière. Après la mort du saumon, les bactéries vont se développer encore plus rapidement parce que les mécanismes naturels de défense du poisson ont cessé de fonctionner.

     Il ne faut jamais, si on "nettoie" un saumon près de la rive, en jeter les déchets dans la rivière, mais les enterrer.

     Il y a aussi le danger de transporter les bactéries de la furonculose à l'aide de l'équipement: bottes, cuissardes, lignes qui seraient employées dans une autre rivière la même journée qu'elles ont servi dans la Matapédia et la Restigouche.

     Si quelqu'un laisse une de ces rivières pour aller sur la Matane, par exemple, il devrait s'assurer que tout l'équipement a séché complètement ou bien il devrait laver le tout dans une solution propre à tuer ces microbes.

     La bactérie cependant affecte seulement les animaux à sang froid, comme les poissons et n'est aucunement dommageable pour les humains. Il n'y a donc aucun inconvénient à conserver le saumon et à le consommer.

     Il y a cependant que le poisson devient un peu moins appétissant, QUAND ON L'A ACHETE D'UN BRACONNIER, à la pensée qu'il a bien pu vous vendre un saumon qu'il a trouvé mort au fond d'une fosse. PENSEZ-Y BIEN: si un homme est assez malhonnête pour braconner, un petit geste du genre dérangera bien peu sa conscience..

D - Le Braconnage

Le braconnage
     Depuis que la pêche sportive s'est sensiblement améliorée - quoique le pourcentage de capture par jour de pêche ait diminué - on parle moins de braconnage en rivière.   Pourtant cette plaie existe encore et elle est tout aussi virulente que jamais. Peu de gens en soupçonnent toute l'intensité et cette activité se pratique même au temps du frai alors que la chair du saumon est à peine comestible.

     Pour vous donner une petite idée du ravage qu'un filet peut causer dans une rivière, j'inclus une photo dans laquelle un brave braconnier exhibé fièrement les résultats d'une vingtaine de minutes d'ouvrage dans une petite fosse de la rivière Patapédia.

     Jugez-en vous-mêmes: les deux saumons qu'il soulève pèsent plus de quarante livres chacun. (N'en doutez pas: le "bonhomme était forgeron et y en avait du poignet!)   Celui dans le coin gauche, au bas de la photo, dépasse les trente livres et il y en a six autres à terre. Si vous remarquez bien la tête du saumon qui se détache contre la jambe droite du braconnier, vous pouvez facilement conclure, par le développement des mâchoires, que cet "exploit" a été accompli très tard en août et fort plus probablement en septembre.

     Je suis d'avis que si chaque épisode du genre qui se reproduit à partir des eaux à marée jusqu'à la tête de la Causapscal était ainsi inscrit sur pellicule, la Vallée de la Matapédia pourrait supporter autant de studios de photographie que de salons de coiffure!

     Ce ne sont pas là des histoires très réjouissantes que je vous raconte mais ce sont des faits que j'étale devant vos yeux afin de faire voir la vraie nature des choses en ce qui concerne le saumon. Vous pouvez en conclure que sa survie est loin d'être assurée et que trop de complaisance en ce qui a déjà été accompli peut être fort dangereux.

     Le fait que la pêche en rivière soit relativement bonne présentement n'est pas une indication valable de ce que nous pouvons envisager pour l'avenir. L'intensification du braconnage a certes des effets immédiats et davantage dans les rivières avec une faible population de saumons. Mais c'est surtout à long terme que les rivières en souffriront parce qu'à moins d'ensemencements massifs, les retours de saumons seront proportionnels au nombre qui aura survécu pour frayer.

     Avec des mesures sérieuses et adéquates adoptées dès maintenant, nous aurons encore du saumon parce qu'en réalité, les remontes sont beaucoup plus fortes qu'on ne le croit généralement. Mais, à défaut, la pêche va pérécliter graduellement comme dans les autres pays qui n'ont pas su respecter et contrôler la ressource.

PARTIE II; QUE VALENT REELLEMENT NOS RIVIERES? COMPARAISONS

     Il échappe aux yeux de personne que le nombre d'amateurs de pêche au saumon augmente de façon spectaculaire et il serait peut-être plus juste de dire de façon alarmante. Nous cherchons à démocratiser ce sport et, c'est un objectif louable, mais, le faisons-nous de façon rationelle?

     Que le plus grand nombre possible puisse jouir de cette ressource exceptionelle: je suis entièrement d'accord avec ce principe, mais est-ce que nous n'encourageons pas trop de gens à se lancer à la poursuite du saumon?

     Que nos populations de saumon se maintiennent au niveau actuel: on devrait être en droit d'espérer cela, et même davantage.   Que toutes les rivières du Québec deviennent accessibles au public: c'est possible en expropriant à coup de millions tout en sacrifiant de très fortes sommes en revenus - c'est le rêve de beaucoup de Québécois.

     Mais il faut cesser de se leurrer: même si tout cela se produisait, dans très peu d'années, il n'y aurait pas assez de saumons pour tous, si le nombre de pêcheurs continue à s'accroître au rythme actuel.

     "Ylhoa-là! plusieurs vont s'écrier. "Y fait-y du chapeau ce "crisse-là?" On a vendu jusqu'à 10,000 jours de pêche en une saison sur la rivière Matane. Nous avons 100 rivières à saumon. Ca fait 1,000,000 de jours ça!"

     Parlant mathématique, c'est vrai, mais parlant pêche au saumon, c'est le comble du ridicule.

     Tout d'abord, il serait bon de détruire un mythe que l'enthousiasme de plusieurs rédacteurs de vie en plein air a répandu chez la population. Presque chaque rivière du Québec que l'on mentionne devient "une des meilleures au monde" et, ainsi de suite.

     Mis, en fait, savez-vous qu'en 1976, une bonne année, seulement trois de nos rivières ont produit 1000 saumons et plus et que deux de celles-là coulent dans la Baie d'Ungava- tout de même un peu loin pour aller donner un coup de ligne après souper! Ce sont la George avec 1,379 saumons et la Baleine avec 1,323. La seule autre à avoir contribué plus d'un mille saumons est la Matapédia (1218) et pourtant on la traite comme rivière de second ordre en l'ayant "matanisée".

     Des rivières d'Anticosti, on dit encore: c'est le domaine du saumon ou se trouvent " les meilleures rivières du monde". La Jupiter et la rivière au Saumon sont de très bonnes rivières mais la Petite-Cascapédia produit des truites aussi grosses que leurs saumons. Les autres ne sont guère que de gros ruisseaux et aucun pêcheur sérieux échangerait la Matapédia pour toutes les rivières de l'Ile.

     Nous avons certes d'excellentes rivières au Québec et je vais les énumérer parce que la liste n'est pas tellement longue :

En Gaspésie:

     - Restigouche : nous en avons la moitié, de l'embouchure à la Patapédia, soit 45 milles, mais, en majorité, ce sont des propriétés privées.
     - Grande Cascapédia; très gros saumons en quantité limitée.
     - Bonaventure; excellente à tous points de vue. Nous y aurons une réserve en 1978.
     - St-Jean: excellente. Déjà en grande partie au public.
     - York; très bonne. En partie au public.
     - Dartmouth; très bonne. Entièrement au public.
     - Matane; déjà au public

Sur la Côte-nord:

     - St-Paul, St-Augustin, Etamamiou, Olomane, Vashicoutai, Natashquan, Mingan, St-Jean, Jupitagan, Moisie, Trinité, Godbout et Ste-Marguerite.

     Il y en a certaines autres qui seraient sûrement dignes de mention mais ce sont des rivières qui ne peuvent accomoder qu'un nombre très restreint de pêcheurs.   Plusieurs d'entre-elles ont des chûtes, tout près de l'embouchure qui limitent l'habitat du saumon souvent à moins d'un mille, même si la rivière peut avoir une cinquantaine de milles de Iongueur.

     Des passe migratoires pourraient en faire d'intéressantes rivières, mais cela coûte fort cher et les résultats ne sont pas immédiats.   Nous avons comme exemples la Mitis, la Madeleine, la rivière aux Rochers et les Escoumains où cela a été fait il y a plus de dix ans et aucune de ces rivières n'est encore "ouverte".

     Il y a aussi que les remontes sont souvent extrêmement tardives dans certaines et qu'elles n'offrent quère plus qu'un mois de pêche par saison et moins dans certains cas. C'est donc dire que des chiffres "basés sur la"matanisation" peuvent induire en erreur.

     Voici maintenant comment produisent les rivières des autres provinces en comparaison avec les "meilleures rivières du monde".

Au Nouveau Brunswick; (saum.& gr.)
     - La Miramichi du Sud-est ; 20,040
     - la Restigouche: 4769
     - la Miramichi du Nord-Ouest: 3,059

A Terre-Neuve:
     -la Humber: 5,163
     -la Ste-Geneviève: 2,393
     -la Gander: 2,506
     -la Eagle: 2,064
     -la Pinware: 1,971
     -la Conne: 1,958
     -1'Exploits: 1,934
     -River of Ponds: 1,850

     C'est dire que nos rivières produisent relativement peu. Par contre, elles donnent un saumon de meilleure qualité et une proportion de 3 saumons pour un grilse, alors qu'en Nouvelle-Ecosse, par exemple, les grilses représentent 81$ des captures.

     Les statistiques du Conseil du Saumon indiquent que l'ensemble des rivières de la Gaspésie ont donné un rendement de 0.26 saumon ou castillon au cours des deux dernières années, soit un saumon ou castillon par quatre jours de pêche. Il y a encore de gros clubs sur la Matapédia, la Restigouche, la Grand-Cascapédia, la Bonaventure, la St-Jean et la York qui contribuent à améliorer la moyenne générale de rendement en n'ayant qu'un effort relativement modéré de pêche. C'est dire que les rivières exploitées par le ministère, exception faite de la Matapédia (secteur Macdonnell-Glen-Emma) et la St-Jean (secteur amont) donnent très peu à ceux qui les fréquentent.

     Il n'y a pas lieu de croire non plus qu'une augmentation du nombre de perches se traduira par une augmentaion équivalente des captures.   Au contraire, une surexploitation ne peut qu'affecter inversement la qualité de la pêche. Aucune de nos rivières produit présentement un saumon par perche par jour et pourtant le rendement de toute bonne rivière accomodant un nombre raisonnable de pêcheurs devrait approcher ce critère.

     En augmentant induement le nombre de perches nous arrivons à des résultats comme nous avons eus sur la Matane où en certaines années il a fallu 14 jours pour capturer un saumon ou un grilse. Et, pourtant, tout le monde sait qu'il s'agit d'une bonne rivière.

     Je sais qu'on peut répliquer que quelques soit le nombre de perches, il se prendra seulement un certain pourcentage des saumons qui habitent une rivière et que par conséquent, on n'affecte pas la ressource. Ca je l'avoue volontiers, mais, que fait-on alors de la qualité de ce sport ?

PARTIE III; UNE PECHE DE QUALITE

     La ressource peut être exploitée selon deux philosophies:

     - Que toutes les eaux soient disponibles sans aucun contingentement de perches, comme la Matane, puisqu'on la cite toujours en exemple.

     - Que l'on essaie d'accomoder le plus de pêcheurs possible, mais en respectant la qualité exceptionnelle de cette pêche unique et presqu'exclusive.

     Dans le premier cas, nous avons une exploitation qui vise la participation du plus grand nombre et elle l'atteint, mais elle porte en elle des germes d'autodestruction. Elle semble avoir comme objectif, la rentabilité et on peut en approcher le seuil avec la pêche au saumon, mais il ne faudrait pas chercher à l'atteindre au détriment de la qualité de l'expérience. Il faudrait chercher à atteindre cette rentabilité en faisant payer le pêcheur selon l'intensité de satisfaction que sa pêche lui procure.

     Le saumon est une ressource de prestige. Ses qualités uniques d'espèces sportives: les subtilités requises pour sa capture, l'imprévisibilité de ses réactions, sa combativité; l'environnement incomparable: la beauté, l'ambiance, la fraîcheur générée par les courants qui animent les fosses dont il fait sa demeure ont tous les éléments requis pour en faire le sport le plus exclusif, le plus vivifiant et le plus rémunérateur que l'on puisse s'offrir.

     Cette pêche est presque par définition un sport qui doit se pratiquer dans la solitude, le silence, la tranquillité, la contemplation.   C'est en quelque sorte une fuite du fébrile quotidien. C'est une détente, mais l'intense concentration qu'elle exige, crée une forme d'euphorie qui a vite fait d'éliminer les ennuis et les tracas les plus persistants..

     Le lecteur verra facilement à la suite de cette description que j'opte pour le système qui verra à conserver à la pêche au saumon, ces qualités qui en font une expérience si exceptionnelle. Cela n'implique pas une diminution du nombre de pêcheurs que nous avons présentement, mais sous-entend certainement que nous devons cesser d'encourager une plus forte participation.

     Un genre d'exploitation comme celui de la Matane, avec une multitude motivée, en grande partie, par la valeur marchande du saumon et encouragée par un tarif ridiculement bas, fait de ce sport une foire comparable à la pêche du petit poisson des chenaux pratiquée à la Pérade.

     D'ailleurs, ce concept d'un nombre illimité de perches sur une rivière répugne par son illogisme flagrant: sur des rivières extrêmement bien aménagées et productives, pêchées par un nombre très restreint, on impose un maximum de deux saumons ou grilses par jour. Pourtant, sur la Matane, on vend deux cents permis par jour, si la demande y est, et chacun à droit à deux poissons quand même.   Alors, si la restriction des prises est imposée pour des raisons biologiques ou de conservation de la ressource, elle est tout-de-même drôlement appliquée dans un cas semblable.

     Comme pêcheur d'expérience, je sais qu'une foule de perches "fouettant" la même fosse va amener de piteux résultats de sorte que la ressource n'en souffrira pas; mais le pêcheur, lui ?

     Cela amène une compétition qui force les gens à se lever avant quatre heures du matin, à se "bousculer" pour accaparer un endroit stratégique, à lancer nerveusement sa mouche tout en suivant furtivement de l'oeil les mouvements de voisins qui, sournoisement auront tôt fait de se placer de façon à couvrir plus adéquatement l'endroit le plus prometteur. La tension augmentera tout au long d'une journée frustrante qui fera regretter l'ambiance relativement plus reposante du bureau.

     Si nous entreprenons de rendre la pêche au saumon accessible comme recréation bénéfique à la population, atteignons-nous vraiment cet objedtif en lui offrant une sortie démunie de toutes les qualités essentielles de ce sport halieutique incomparable ? Avons-nous réellement répondu à ses voeux en émettant des milliers de permis dans une saison qui rapporte quelques quatre cents saumons dont, peut-être la moitié sont capturés par une vingtaine d'assidus qui souvent supplémentent l'assistance de l'Etat par la vente de ces saumons ?

     J'ai toujours préconisé le système de zonage avec contingentement de perches pour chaque secteur. C'est le système que nous appliquons dans tous les endroits où l'on paye cent dollars et plus par jour et les pêcheurs qui les fréquentent n'en voudraient pas d'autre. Il est étonnant de voir le nombre grandissant de Québécois qui sont maintenant prêts à y mettre le prix pour obtenir une pêche de qualité. C'est qu'une fois vraiment atteint de "saumonite" on ne peut plus se contenter d'un sport qui n'est plus un "match" entre le pêcheur et le saumon mais une compétition avec d'autres pêcheurs.

     Tous ne peuvent se payer cette pêche aussi exclusive et c'est regrettable, mais, de plus en plus, on voit des gens diminuer le nombre de leurs visites sur les rivières en échange de deux ou trois jours d'une pêche de qualité dont ils savent maintenant apprécier les mérites dans toute son intensité.

PARTIE IV; PEUT-ON EVITER LA SUREXPLOITATION, TOUT EN DONNANT UNE CHANCE A CHACUN ?

     Peu de problèmes sont sans solution.

     Tous doivent se mouvoir, se déplacer:   une minorité le fait en Cadillac tandis que les autres se contentent d'une Volks, pédalent ou marchent. C'est un fait accepté dans toutes les sociétés et en somme, c'est la capacité de payer qui détermine ce que l'on peut se permettre.

     Il y a bien des sortes de sports et aussi tous genres de pêche: comme on peut se déplacer en Cadillac, en véhicule le plus modeste ou à pied, on peut aussi adopter une pêche très coûteuse, à prix plus modique ou en pratiquer une qui est gratuite.

     Partie de la solution, en accord avec les principes énoncés plus haut, est de revaloriser ce sport qu'est la pêche au saumon, de faire comprendre à ceux qui veulent le pratiquer qu'il s'-agit d'une chose fort exclusive que l'on peut se permettre dans bien peu de pays au monde.

     Beaucoup de ceux qui font la pêche sont prêts à débourser de douze à quinze dollars pour aller voir les Canadiens massacrer les Capitals de Washington pendant une heure.   Ils paient aussi de huit à dix dollars pour taquiner la traite et trouvent cela parfaitement raisonnable.

     Dans le cas du saumon il y a une grosse différence:   on ne peut pas manger la rondelle, mais le saumon, lui, est comestible et sa chair est même délicieuse; si le pêcheur n'en est pas friand, il peut facilement en obtenir deux dollars et plus la livre. Dernièrement, un pêcheur commercial qui doit sûrement posséder une "Maîtrise en Captures Incidentelles" en offrait 600 livres à mon frère, à $3.55 la livre. Incidemment, ce degré M.C.I. est accordé par le M.I.C (Ministère de l'Industrie et du Commerce). Etonnante et curieuse coincidence tout de même!

     Non, à un prix si ridiculement bas, il est à se demander quelle proportion des gens qui "fouettent" les fosses le font parce qu'ils aiment ce sport ou pour ce qu'il peut rapporter. Il s'agit d'une trop grande valeur récréative pour les vrais amateurs et il ne faudrait pas la laisser envahir par des "carpons à la recherche de viande" au détriment et de la ressource et de ceux qui veulent en profiter honnêtement.

     Il n'en coûte rien pour produire de la morue, du flétan, maquereau, hareng, mais l'aménagement des rivières à saumons le maintien de piscicultures, la protection représentent une forte charge pour le contribuable. Une bonne partie en est récupérée par des revenus touristiques accrus, mais, tout de même, celui qui jouit de la ressource devrait s'attendre à payer davantage pour le privilège.

     Je fréquente énormément d'amateurs, c'est partie de mon métier, d'ailleurs, et tous semblent d'accord pour payer plus afin d'obtenir un peu plus d'exclusivité aux fosses et ne pas avoir à se lever à trois heures de la nuit afin de ne pas y arriver trop tard.

     Le système de secteurs avec quotas de perches et un prix sensiblement plus élevé semble donc le premier pas à faire pour prévenir cet envahissement de nos rivières qui enlèvera à la pêche toutes ses qualités exceptionnelles qui en font une si grande valeur récréative.   Je sais que cela n'est pas tellement facile à comprendre pour quelqu'un qui n'a jamais fait la pêche au saumon, mais j'ai la certitude, après l'avoir pratiquée depuis trente-cinq ans, que la grande majorité des amateurs verront que je parle dans leur intérêt.

     Evidemment, il faut que ces secteurs soient de valeur à peu près égale. Cela s'obtient en considérant le nombre et la capacité de rendement de chacune de ces fosses qui formeront un secteur avant d'établir le nombre de perches qui y sera alloué.

     Quand nous n'avons pas cela, tous les pêcheurs de la partie de rivière disponible attendent en ligne aux deux ou trois meilleures fosses comme des clients au comptoir d'une cafétéria. Je n'ai pas l'impression que des gens de grandes villes qui ont déjà l'occasion de se mettre en ligne assez souvent, s'attendent à le faire après avoir conduit des centaines de milles pour venir pêcher le saumon.

     Puisque la Matane a toujours été exploitée sans contingentement depuis qu'elle a été rendue accessible au public et que la ville de Matane en profite considérablement, que l'on y continue ce système. Je crois cependant que le prix du permis devrait être légèrement majoré sinon, cette rivière à coût trop modique continuera d'inciter trop de nouveaux venus à se lancer à la poursuite du saumon.

     Je suis, et ce n'est qu'être conséquent dans ses idées, contre ce principe appliqué sur toute autre rivière. Avoir "matanisé" la Matapédia, c'est presqu'indécent et c'est clairement la décision de gens qui ne la connaissaient pas du tout.   Nous n'en sommes qu'aux premiers jours de juillet et la rivière a déjà produit plus d'une quarantaine de saumons de trente livres et plus et nous savons que bien des captures ne sont pas déclarées à nos bureaux.   La semaine dernière, un de mes amis a capturés huit saumons d'un poids moyen de trente et une livres.   Très peu de rivières peuvent donner un tel rendement.

     Cela vous semble-t-il le genre de pêche à offrir à six dollars par jour et sans limite du nombre de perches? On charge vingt dollars sur la Dartmouth qui n'est nullement comparable et on entend aucune plainte au sujet du prix; au contraire, les gens se sentent privilégiés d'avoir un endroit où ils savent, en partant, qu'il va y avoir tant de perches et pas plus.

     Nous avons, au cours des années, contribué à développer ce goût de la pêche au saumon chez une multitude de gens; ils savent maintenant l'apprécier et ils désirent la pratiquer dans des conditions plus propices à garantir, sinon plus de succès, du moins une ambiance plus appropriée à la pratique d'un sport de cette qualité.

     C'est aux autorités du ministère qu'il appartient de déterminer ce que devraient être les nouveaux tarifs. Ils ne devraient pas nécessairement être uniformes, quoique ce serait juste si le nombre de perches allouées dans chaque secteur était réellement en proportion de la capacité de produire des différents secteurs et rivières.

     Dans mon opinion, il ne subsiste aucun doute cependant; nous ne pouvons continuer à encourager une plus forte participation au même rythme que nous l'avons fait sans, au bout d'un certain temps, sentir que "l'on tient un tigre par la queue ".

     A la longue ce doit devenir pénible, mais, si on le lâche...