La Planification d’un Voyage de Pêche

     Lors du dernier article, on abordait l'importance de remiser adéquatement son équipement, afin d'éviter que les premières journées de pêche soient désagréables lors de la prochaine saison.

La Planification d’un Voyage de Pêche
     Celui qui s'aventure à pêcher sans une bonne planification s'expose de même à des problèmes importants qui peuvent gâcher les rares journées qui nous sont accordées pour taquiner salar.

     Nous avons tous entendu parler de certaines personnes qui partent la veille du premier jour de pêche, n'ayant qu'à l'esprit de mettre leurs bottes, de prendre leur canne à pêche, de sauter dans l'eau et de prendre un saumon. J'ai entendu dire qu'il y en avait même qui partaient dès leur journée de travail terminée et qui conduisaient toute la nuit avec les mêmes objectifs (bien sûr, il ne s'agit pas de nous).

     A la rigueur, cela peut se comprendre si la destination est une rivière que nous connaissons. Cependant, pour la plupart d'entre nous qui essayons différentes rivières ou qui n'allons pêcher que quelques jours par saison, cette méthode donne très rarement de bons résultats.

     Bien que la fatigue soit camouflée par notre désir pressant de pêcher, elle prend rapidement le dessus. C'est ainsi que lors de la première journée de pêche, à 15 heures on se sent comme s'il était 21 heures. À ces moments, il n'est pas rare, pour ceux qui se promènent le long des rivières, de voir dans l'eau des pêcheurs marmonnant continuellement « il n'y a pas de saumon icitte BIP », « Il fait chaud en BIP », « C'est une BIP de rivière », etc.

     En fait, un voyage de pêche au saumon, ça se planifie et ça nécessite certains préparatifs si l'on veut jouir le plus possible de ces plaisirs. Et ces voyages coûtent souvent cher : essence, hébergement, droits d'accès, nourriture, etc. Personnellement, j'évalue qu'une journée de pêche dans un secteur public coûte environ 150 $, et cela varie bien sûr selon l'endroit de départ. De plus, lors d'un voyage de pêche, on utilise souvent des journées de vacances difficilement gagnées.

     Il est donc essentiel de profiter de l'hiver pour se bien préparer. Chaque article de l'équipement que nous utilisons pourrait être abordé. Cependant, nous nous en tiendrons ici à ceux qui demandent un soin particulier.

La Planification d’un Voyage de Pêche
Les mouches : attention !

     Lorsqu'on utilise des mouches de la saison précédente, il n'est pas rare de constater qu'un hameçon s'est brisé durant le combat avec un saumon; cette mouche peut alors servir à orner votre chapeau. Avant de partir pour la pêche, il faut vérifier soigneusement si les hameçons qu'on utilise ne sont pas rouilles. Le plus souvent, cela se produit sur la partie qui retient la mouche dans la boîte, un endroit difficilement visible sans retirer les mouches une à une. Il faut aussi s'assurer que les hameçons ne sont pas tordus. Des mouches mal entreposées peuvent faire en sorte que les garnitures se défont facilement après seulement quelques lancers. Habituellement, cette situation se produit lorsque les mouches sont entreposées dans des endroits trop humides. Attention aussi aux boîtes de mouches qui ont été dans l'eau lors de la saison précédente. Elles retiennent l'eau très longtemps, ce qui fait rouiller les hameçons.

     Nous vous conseillons donc d'entreposer les mouches dans un endroit sec (par exemple sur un mur de la chambre pour ceux qui font chambre à part !) ou de vous en procurer de nouvelles avant de partir. À cet effet, il semble plus avantageux de posséder quelques exemplaires de différents formats des mouches avec lesquelles on aime pêcher, plutôt qu'une centaine de mouches différentes qui restent pour la plupart inutilisées.

Les avançons

     Les avançons qui sont trop vieux ou que l'on « conserve » sur le tableau de bord de l'auto peuvent se briser facilement à des moments où on ne le voudrait surtout pas. De plus, il faut savoir que le fait de quitter le magasin avec une bobine neuve n'est pas une garantie de fabrication récente. Je l'ai appris à mes dépens, il y a trois ans. Après quelques jours de pêche, j'ai eu la chance (lire talent !) de piquer quelques saumons. Cependant, pour des raisons que je considérais comme venant de la malchance, les saumons partaient avec ma mouche. La première fois, je me suis dit que j'avais dû heurter une roche lors d'un lancer précédent ou que ma ligne s'était nouée sans que je m'en aperçoive. Mais, lors de la deuxième rupture, les traces laissées sur l'avançon m'ont laissé perplexe. C'est en l'examinant que j'ai pu constater qu'il n'y avait pas le petit « c » que laisse habituellement une rupture sur une roche ou un noeud. Je crois que ce petit « c » est un diminutif du mot qu'on utilise lorsqu'on perd un saumon à cause de ces ruptures.

La Planification d’un Voyage de Pêche
     L'idée me vint alors de vérifier mon avançon et la bobine qui le contenait. Bien qu'il s'agissait d'une bobine neuve, j'ai pu constater qu'avec une pression ne dépassant pas une à deux livres l'avançon se brisait facilement.

     Alors, lorsque nous planifions un voyage de pêche, il faut s'assurer d'avoir des avançons de bonne qualité. N'hésitez pas, même au magasin, à en dérouler un bout et à le tester. Ce n'est pas une fois rendu dans la rivière qu'on peut corriger un problème comme celui-là.

     Pour ceux qui font eux-mêmes leurs avançons de type dégradé (voir 5almo Salar n°36, septembre 1994), il est avantageux d'en préparer d'avance. Les noeuds qui lient les brins de différentes grosseurs doivent être vérifiés avant de s'en servir. Les vérifier lors d'une partie de hockey devrait donner une bonne idée de leur résistance. Durant les trois longues saisons où l'on ne pêche pas, pourquoi ne pas s'exercer à faire de bons noeuds qui attachent la mouche. L'idéal serait de parvenir à les faire les yeux fermés. Qui sait, un jour, ou plutôt un soir, ça pourra vous servir, surtout si vous avez négligé la préparation de votre voyage (si vous avez oublié votre lampe de poche, par exemple, ou encore si les piles sont épuisées).

Sur le terrain

     Contrairement aux situations présentées au début de cet article, l'arrivée sur le terrain nécessite aussi une certaine planification.

     Il faut, selon nous, arriver à la rivière quelques heures d'avance et, si possible, une journée à l'avance. Procurez-vous d'abord une carte de la rivière et allez repérer le ou les secteurs où vous pécherez. Si vous n'avez pas le temps de faire toutes les fosses, essayez tout de même d'en faire quatre ou cinq consécutives. Bien qu'elle soit discutable pour certains, cette façon de faire permet, selon nous, de localiser les concentrations de saumons et leurs déplacements.

     S’il y a des véhicules stationnés près des fosses, essayez de voir d'où viennent ces pêcheurs ; cela peut donner de bonnes pistes (pêcheurs de la région ou pêcheurs étrangers). Il est assez facile du reste de connaître leur provenance en examinant les véhicules. Plus souvent qu'autrement, le pêcheur « local » connaît les bonnes fosses et le déplacement des saumons.

     L'approche de la fosse doit se faire discrètement, tout comme il faut s'habiller de façon à être vu le moins possible lorsque l'on pêche. L'approche permet de voir où les pêcheurs se positionnent, quelle méthode ils utilisent (sèche ou noyée) et de quelle façon ils s'exécutent. La carte de la rivière qu'on a pris soin d'apporter avec nous peut servir avantageusement à prendre des notes sur nos observations type de pêche (« S » sèche, « M » noyée), les sections de fosses qui paraissent les plus intéressantes (« T » tête, « R » rapide, « P » pied) et le côté de rivière où il est préférable de pêcher. On peut aussi noter certains repères où l'on a pu observer le saumon, l'ensoleillement des fosses, le niveau de l'eau, les courants, les obstacles et l'endroit où traverser au besoin.

     Après une approche discrète, il peut être intéressant de voir les réactions du pêcheur lorsqu'il constate tout d'un coup qu'on est là. Bien qu'ayant observé, sans être vu, ce pêcheur qui est toujours demeuré au même endroit (ce qui indique habituellement qu'il a vu ou « senti » quelque chose à cet endroit), celui-ci va se déplacer, comme par hasard, afin de ne pas montrer son « spot». À ce moment, on peut s'approcher de lui et lui poser des questions. Étant donné qu'il ne sait pas depuis combien de temps vous l'observez, il répondra généralement de façon juste à vos questions pour ne pas risquer de passer pour un menteur.

     Rester près du pêcheur quelques instants permet d'observer sur sa veste les mouches qu'il a utilisées dans la journée (grosseurs, couleurs, types).

     Ainsi, en quelques heures, on peut faire plusieurs fosses et y recueillir des informations qui font économiser beaucoup de temps et qui évitent bien des déceptions. On aura vu les sentiers, les fosses, les saumons, les pêcheurs, le type de pêche, etc.

Conclusion

     En résumé, pour profiter vraiment d'un voyage de pêche, il faut le planifier. Pour ce faire, on doit s'assurer au préalable de la qualité de notre équipement, arriver à l'avance et explorer les lieux. De plus, pêcher reposé améliore considérablement la qualité du séjour et les chances de prendre un saumon. Dans les faits, la pêche au saumon est peut-être une question de chance, mais l'observation contribue sûrement à l'augmenter.

référence

» Par Luc F. et Denis Lord
» Photos Nelson Michaud en collaboration avec l'École de pêche de Matane
» Salmo Salar #45, Hiver 1996.
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