Le Doré prend aussi la mouche

     Plus souvent qu'autrement, la pêche à la mouche est associée à la pêche des salmonidés. pourtant, le doré prend bien certains types d'artificielles; nous vous proposons quelques éléments qui vous permettront de le récolter aussi bien en lacs qu'en rivières.
 
     Après plus d'une douzaine d'années passées à rechercher et à récolter le doré à la mouche, ainsi qu'à initier un grand nombre de moucheurs à cette technique, il m'est toujours surprenant de rencontrer des pêcheurs pour qui la capture d'un doré sur une artificielle semble un exploit chimérique Et pourtant, cette approche s'avère des plus intéressantes et des plus productives, pour peu qu'on utilise la technique de pêche appropriée et les bonnes artificielles.
 
     Il va de soi que la connaissance de ce poisson sportif est un atout indispensable, mais ça c'est une autre histoire qui a d'ailleurs fait l'objet de maints articles. Mon but aujourd'hui est plutôt de vous transmettre l'information nécessaire pour qu'enfin, vous connaissiez cette sensation particulière de tenir un de ces «yeux d'or» au bout de votre soie et ce, aussi bien en lac qu'en rivière.

L'équipement

Le Doré prend aussi la mouche
     Étant donné que la pêche du doré se pratique surtout en profondeur, il est donc essentiel de vous munir d'une bonne soie calante, qui le sera préférablement sur toute sa longueur, de façon à pouvoir rejoindre le poisson à son niveau de tenue. Quant à la rapidité de plongée de la soie, celle-ci est avant tout une question de préférence et c'est à l'utilisateur de déterminer celle qui lui convient et à s'y adapter. Avec l'usage, il en arrivera à reconnaître le moment où la mouche a rejoint le doré, stationné près du fond.
 
MA TECHNIQUE PRÉFÉRÉE
 
     Le doré, comme la plupart des espèces sportives habitant les cours d'eau, se déplace d'une fosse à l'autre en remontant la rivière. Il effectue ses déplacements principalement en fin de soirée, et tout particulièrement en période de crue. En période d'étiage, le doré se concentre dans les fosses ou bassins au pied des rapides, et c'est à ces endroits que la pêche du doré en rivière s'avère des plus fertiles.
 
     La technique alors préconisée pour provoquer ces dorés s'avère assez simple. Le pêcheur doit se poster en amont, dos au courant, et lancer son artificielle vers l'aval, dans le rapide, en laissant progressivement dériver un surplus de soie pour permettre à l'artificielle d'atteindre le fond de la fosse. Lorsque celle-ci en a rejoint le fond, ramenez votre soie par portions de 8 à 10 po. (20 à 25 cm). Votre mouche commencera alors à s'élever et passera au-dessus de la tête du doré qui la foudroiera au passage.
 
     Contrairement au doré qui vit en lac, le doré de rivière ne se tient pas nécessairement par bandes d'individus du même âge, et les fosses abritent aussi bien de petits sujets que des gros. D'ailleurs, les captures de poissons de plus de 3 livres (1,3 kg) sont assez fréquentes. Il est assez surprenant de témoigner de la force d'un doré qui cherche à remonter le courant Toutefois, le pêcheur qui lance à partir de la rive diminue considérablement ses chances de succès, car les dorés se tiennent habituellement en bordure du courant et sont généralement stationnés les uns derrière les autres, plutôt qu'en bandes serrées.
 
     La pêche en rivière atteint son heure de pointe au crépuscule, alors que le doré part en chasse surtout en soirée et qu'il est alors plus enclin à gober votre artificielle. Par contre, lors de journées sombres et pluvieuses, le doré mord bien durant le jour, et parfois de façon étonnante. Après une période de grandes crues, alors que l'eau est encore quelque peu brouillée et que le doré voyage d'une fosse à l'autre, celui-ci peut même prendre la mouche en plein soleil.

Pêche en lac

     La pêche en lac est non seulement possible en soirée, mais aussi le jour au grand soleil de l'après-midi. Fini le temps où les pêcheurs de doré devaient patienter jusqu'au crépuscule pour se mettre en quête de ce poisson.

    Nous pouvons identifier ici deux types de lacs à dorés, ou encore deux types d'habitats qui régissent la motivation du doré à prendre la mouche. Le premier est un lac comportant des fosses peu profondes, de l'ordre de 1 0 à 15 pieds (3 à 4,5 ml, et où l'on note la présence de nombreux hauts-fonds. Cet environnement permet encore au doré de fuir la lumière, tout en offrant des profondeurs accessibles pour le pêcheur à la mouche. Le second habitat comporte de vastes fosses très profondes où évolue constamment le doré qui ne monte en surface qu'au crépuscule La pêche dans ces lacs rapporte des dividendes évidemment en soirée, bien qu'un pêcheur aguerri puisse toujours retracer un «trou» où quelques dorés téméraires s'activent en plein jour. C'est en explorant ces petits et grands plans d'eau que vous découvrirez ces lieux de prédilection, propices à la capture de dorés au grand jour.

Fosses de stationnement

     Parmi ces sites susceptibles de procurer des sensations fortes aux pêcheurs à la mouche des dorés, il en est un particulièrement apprécié de ceux-ci: les fosses de stationnement. J'entends par là les lieux, dans un lac, où le doré peut se poster dans l'attente de nourriture. Ce peut être une chute, une rivière se déversant dans le lac ou encore un courant près de la décharge du lac.
 
     Ce type de fosse permet au pêcheur d'ancrer son embarcation et de pêcher à sa guise et cela, toute la journée, aussi bien sous un soleil radieux que par temps nuageux. Il n'a qu'à laisser descendre sa mouche bien au fond, pour la ramener directement au-dessus de la tête du doré, contrairement aux fosses plus vastes où il doit pêcher à la traîne pour tenter d'intercepter le doré qui voyage d'une fosse à l'autre.
 
     Bien que cette approche facilite la tâche du pêcheur, la rentrée de la mouche doit toutefois se dérouler selon un rythme bien précis. La récupération doit se faire par portions de 8 à 10 pouces (20 à 25 cm) à la fois, en laissant un temps mort à tous les trois pieds (1 m) de façon à permettre à la mouche de descendre. Si un doré la suivait, ce serait alors l'occasion pour lui de la gober. Si aucune touche ce fait sentir, il faut recommencer le même manège. Le doré qui somnole sur le fond est souvent paresseux. Il lui arrive de prendre la mouche d'un mouvement à peine perceptible et de suivre son déplacement sans l'avaler. Surveillez bien les légères augmentations de tension de votre soie. Souvent, en pareil cas, il arrive que le doré suive la mouche jusqu'à la surface, pour s'en emparer à la dernière minute juste au moment où votre artificielle émerge.
 
     Quant à la pêche à la traîne, cette technique s'avère plus simple, quoique différente de la précédente. Encore ici, le souci d'exactitude doit primer L'embarcation doit se déplacer lentement en contournant les pointes rocheuses, les plages sablonneuses, les hauts-fonds, les entrées et les sorties des rivières. À l'occasion, il arrive que le doré s'aventure dans les baies peu profondes, offrant alors au pêcheur à la traîne une qualité de pêche exceptionnelle lors des après-midi ensoleillés. Recherchez les baies assez vastes, peu profondes et dont le fond est jonché de branches et de bois morts. Loin de vous rebuter, ces endroits devraient plutôt faire l'objet d'une attention spéciale car, bien souvent, ils cachent une famille de gros dorés. Et souvenez-vous de toujours bien relever l'endroit où vous avez fait une capture, car c'est là que, bien souvent, vous en obtiendrez une seconde.
 
     La pêche à la traîne se fait sur une soie tendue et les attaques des dorés se font bien sentir par leur agressivité. Le problème cependant réside en la capacité de rejoindre la profondeur exacte de tenue des poissons. Une soie calante à plongée ultra-rapide peut alors s'avérer utile dans certains cas.
 
     À l'occasion, lorsque le doré tarde à répondre, un changement de cadence est à conseiller pour provoquer ce prédateur. Il s'agit alors de ramener brusquement la canne, normalement tenue à un angle de 90°, vers l'avant, pour ensuite laisser aller votre bras vers l'arrière en synchronisant ce mouvement avec la vitesse de déplacement de l'embarcation. Il se produit alors un temps d'arrêt dans le cheminement de l'artificielle, suffisamment long pour que le doré tente de saisir la mouche juste avant qu'elle reprenne sa course.

Les artificielles

     Le doré affiche un goût particulier pour les montages et les couleurs des artificielles qu'on lui présente. Il semble d'ailleurs démontrer une préférence marquée pour les modèles colorés et avec le temps, la liste de son «menu» de plumes et de poils s'étoffe, tout comme nos connaissances à son sujet.
 
     Un montage de ma création m'a permis de réaliser de belles captures, je l'ai baptisé la Juneau Spécial. Cette artificielle flamboyante a l'heur de plaire au doré, tout comme au monteur puisque ce montage unicolore ressemble, à quelques nuances près, à celui d'un streamer conventionnel. À utiliser en plein jour lorsque vous pêchez en rivière, ou encore sur un lac, bien ancré au-dessus d'une fosse. À la traîne, cette artificielle s'avère plus efficace en fin de soirée.
 
     Pour la pèche à la traîne au gros soleil de l'après-midi, la Juneau Smelt est tout indiquée, tout comme sa compagne la Mickey Finn à tête rouge qui a entre autres fait des ravages dans la région de Chibougamau. Ajoutons à ces bucktails la Grenade de Claude Bernard, qui a été pensée en fonction du doré, et vous disposez maintenant de quatre montages qui à eux seuls, vous procureront des instants inoubliables.
 
     Le doré étant un carnassier, quoi de plus naturel qu'il s'attaque volontiers aux streamers et aux bucktails. Mais ne vous y trompez pas, ce poisson sportif sait aussi faire preuve de sélectivité. Ainsi, je l'ai vu à de nombreuses occasions fondre littéralement sur des éclosions d'Éphémères, en particulier en juillet alors que les gros «Green Drake» envahissent la surface des lacs. L'examen ultérieur du contenu stomacal de dorés fraîchement capturés a d'ailleurs confirmé mes observations.
 
     Quoique la pêche du doré à l'aide d'une mouche sèche reste encore un domaine à explorer, il n'en reste pas moins qu'en rivière, ce poisson d'eau douce ne se fait pas prier pour prendre les nymphes que nous lui présentons, plus précisément la Stonefly et la Casual Dress. Alors, pourquoi ne pas élargir votre Champ d'expérience en ajoutant le doré à votre liste des poissons sportifs à taquiner à l'aide d'une artificielle? Avec un peu d'adresse, une bonne connaissance du plan ou du cours d'eau pêché la technique appropriée et le menu de circonstance, ce qui vous semblait hier impossible deviendra aujourd'hui une expérience enrichissante.

Grenade

Hameçon: Mustad #79580, #2 ou 4.
Fil : Noir.
Queue: Une quinzaine de poils de queue de veau blancs, du quart de la longueur de la hampe de l'hameçon.
Corps: Tinsel Mylar plat, argent.
Côtes: Tinsel ovale, doré, large.
Aile: Une pincée de poils de queue d'écureuil gris, teints jaunes, sous une demi-pincée de poils de queue d'écureuil renard, sous une demi-pincée de poils de queue d'écureuil noir;
Coiffe: 3 barbes de plume de paon (œil de queue de paon).
Joues: plumes de coq de Sonnerat. de la moitié de la longueur de la hampe de l'hameçon.
Tête: FiI de montage jaune.

Juneau spécial

Juneau spécial
Hameçon: Mustad # 79580, #4.
Fil: Rouge.
Queue : Pincée de fibres de hackle bien duveteuse (webby) de couleur orange.
Corps : Laine phentex orange.
Côtes : Tinsel embossé or #14.
Gorge : Fibres de hackles bien duveteuse de couleur orange.
Aile: 4 Hackles de selle orange.
Tête: Rouge, avec un œil peint en blanc et un centre noir.

Juneau Smelt

Hameçon: Mustad # 79580, #2.
Queue: Section de plume de flanc de canard branchu bout noir et blanc.
Corps: Tinsel embossé argent.
Gorge: Fibres bien duveteuses de hackle rouge clair.
Aile: Poils de queue de chevreuil blancs, jaunes et bleu pâle.
Coiffe: 8 Fibres de plume de queue de paon.
Épaule: Plume de flanc de canard branchu.
Tête: Noire avec un œil peint en blanc et un centre noir.

Références

» Texte et photos Jacques Juneau (Mai 1988).
» Illustration: Jeannot Ruel.
» Magazine Sentier Chasse & Pêche.
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